mercredi 12 décembre 2012

D'expositions impressionnistes clés en main à l'étranger





L'odyssée mondiale du musée d'Orsay













Centre Culturel Banque du Brésil. Rio de Janeiro.
Octobre - Janvier 2013





Crise oblige, le musée propose de plus en plus d'expositions impressionnistes clés en main à l'étranger. Ce faisant il accroît sa notoriété, mais aussi le risque d'une fragilisation des œuvres.



 Par Eric Bietry- Rivierre


On peut en prédire le succès. Après Paris, l'exposition sur «L'impressionnisme et la mode» ira à New York et à Chicago dont les musées sont coproducteurs. Le long de la Seine, les deux mots magiques séduisent déjà les foules: 177.090 visiteurs en 35 jours d'ouverture, soit la jauge quotidienne de 5000 légèrement dépassée. Et il y a fort à parier que, dans la file, la proportion d'étrangers soit supérieure à la moyenne des entrées au musée, de 54 %.
C'est en 2009, sous l'impulsion de son président Guy Cogeval, qu'Orsay est passé en démultiplié en matière de prêts groupés, n'hésitant plus à concevoir des expositions clés en main. Crise oblige, comme il fallait autofinancer au maximum les importants travaux de modernisation et d'agrandissement aujourd'hui réalisés, deux groupes de chefs-d'œuvre ont effectué, chacun séparément, un tour du monde. De Madrid à Nashville en passant par San Francisco, des toiles qui témoignent de la naissance de l'impressionnisme ont ainsi été vus par près de 900.000 personnes en neuf mois. Quant à celles considérées comme postimpressionnistes, elles ont fait étape à Canberra, Tokyo et San Francisco, et ont fédéré plus de 1,7 million d'amateurs en dix mois et demi. Bilan: environ la moitié des 20 millions d'euros nécessaires au chantier financés par ce biais. Un exploit comptable? Pas seulement.
Raccrochés dans leurs salles aux tonalités et ambiances nouvelles, ces ensembles désormais mieux connus en dehors de nos frontières renforcent l'éclat déjà incomparable des collections maison. Cette année, Orsay devrait finir à 3,7 millions d'entrées, soit presque 100 % de sa capacité estimée par Guy Cogeval à 4 millions.
En 2009-2010, d'autres trésors ont également joué les ambassadeurs extraordinaires. Avec une mission identique: drainer des fonds capables au moins de compenser la baisse des subventions (2,5 % auxquels s'ajoute cette année un prélèvement dans le fonds de roulement), et faire briller l'institution. Une sélection de pièces emblématiques de l'Art nouveau et de l'industrie du luxe au XIXe siècle a ainsi sillonné le Japon, rassemblant près de 134.000 visiteurs en un semestre. Un amuse-bouche avant les rétrospectives Manet à Tokyo et Degas à Yokohama qui, elles, ont été vues par près de 660.000 curieux. Tandis qu'une exposition plus modeste, sur le thème de la femme moderne, avait lieu à Vancouver (90.000).
L'année dernière une sélection tous azimuts de pièces évoquant «Paris et la modernité» est allée à Singapour et à Séoul. Autre zone géographique, défrichée cette année: l'Amérique du Sud. Un continent qui, en matière d'art, s'impose comme la terre promise émergente. Quelque 320.000 visiteurs ont en effet convergé à São Paulo pour admirer «Paris et la modernité» au Centro cultural Banco do Brasil. Fin octobre, l'exposition a été installée à Rio où on espère qu'elle dépassera les 500.000 personnes d'ici à la mi-janvier. Avant son ultime étape, à Madrid. Simultanément, du 16 novembre au 28 février, 87 tableaux autour de Millet, Courbet et du naturalisme français vont participer à l'inauguration du Musée des arts chinois de Shanghaï, l'événement du XIVe festival des Arts internationaux de Chine. Une manière efficace de bien se faire voir dans un empire du Milieu sans cesse plus friant d'art occidental ancien.

             Brésil et Japon demandeurs

Pour 2013, l'effort s'annonce toujours aussi intense. Orsay étudiera les rapports de Manet avec Venise, au Palais des doges, du 24 avril au 4 août. Puis, divers chefs-d'œuvre impressionnistes repartiront au Japon, destination le National Art Center de Tokyo, du 9 juillet au 14 octobre 2014. Fin 2014-début 2015, ce sera au tour des Renoir d'entreprendre le voyage d'Italie. Pour la suite, on cherche les thèmes. Mais pas les destinations. Le Brésil et le Japon, pour l'anniversaire du Nikkei en 2016, sont d'ores et déjà demandeurs. Guy Cogeval assure qu'on ne déplacera jamais une œuvre trop fragile. Mais face à l'intensification de prêts plus motivés par la pédagogie, la diplomatie ou l'économie que par la recherche scientifique, les conservateurs doivent redoubler de vigilance.















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